J’aurais pu errer infiniment, sous l’aridité d’une méditation morne, à guetter l’oasis d’une inspiration rafraîchissante……………………………………………………………………….
………… Sec,……………… Sec je restais, à traîner, amère et vaine, ma quête …………….
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Je rêvais de Monod, de Lawrence, Buzzati, des tartares et comme le lieutenant, ne voyais rien venir. Fort Saganne et Depardieu en nage, se bousculaient les images de désert glânées depuis l’aube de mon temps. Celui du Sahel, des vaches et vachers faméliques qui abritent tant de mouches, des peuhls grands et fiers abreuvés aux carotides des buffles, des noirs guerriers longilignes aux yeux cristallins. Kasbahs, oueds, Algérie de tant de plaies, soleil de plomb, Camus.
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L’évocation des méharées, la rumination hautaine et dédaigneuse des vaisseaux du désert ont finalement fait jaillir des dunes de mon errance un fameux crabe aux pinces d’or qui résumait si brillamment cet halo de mirages… Cling !
*Pour rappel, la ronde c'est écrire chez quelqu'un qui écrit chez un autre, sur un mot choisi, un texte illustré.
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Pendant que je me glisse chez Franck Bladou, j'accueille ici Dominique Hasselmann. Bonnes lectures.
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Imaginer l’inimaginable
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– La voix pourrait venir de l’au-delà…
– tu l’entends comment ?
– non pas sépulcrale, mais douce, murmurante…
– bienveillante ?
– oui, sûrement, mais pas au sens « macronien » du terme, qui est baigné d’une sorte de commisération ou de compassion de classe…
– une voix inouïe, en quelque sorte !
– oui, on la découvrirait au fur et à mesure de son discours, du déploiement de ses volutes, de ses arabesques, de ses migrations…
– mais ce serait une voix de femme ?
– pas forcément, tu vois, elle aurait des intonations si mélodieuses, un chant
à la Philippe Jaroussky, une mélopée angélique sans sexe défini, haute-contre (la bien-nommée) en quelque sorte…
– ce serait envoûtant mais pas castrateur ?
– non, il suffirait de l’écouter, de se laisser subjuguer, entraîner au loin sur des vagues délivrées, puis de naviguer vers l’inconnu !
– comment la faire advenir, alors ?
– c’est simple : non pas prier, mais souhaiter, non pas invoquer mais croire.
– elle sortirait soudain des limbes, des nuages, elle « enchanterait » notre petit univers, détruirait tous les antagonismes possibles ou existants…
– une sorte de réconciliation pacifique – faut-il s’y fier ? – malgré les bruits de guerre, les hurlements camouflés sous le masque du libéralisme bien tempéré, les laissés-pour-compte et les abandonnés de tous ?
– oui, sans doute trop beau pour être vrai : quel serait le pouvoir de cette voix, à part l’espoir de l’entendre, de l’écouter et de ne rien en tirer sans doute ?
– simplement l’idée de son apparition – hors de tout passage à Lourdes – comme un signe céleste mais terrestre, une caresse fortuite, une musique angélique au-delà de toutes les frontières ou barrières, une sorte d’humanité retrouvée alors qu’elle semble reléguée par nos adeptes des « neuros-sciences » dans les cursus pédagogiques de « l’ancien monde », un horizon où les contradictions se résoudraient soudain, comme d’un coup de baguette magique, par la grâce de la beauté…
– joli programme politique : mais personne n’y avait pensé avant toi ?
– mais figure-toi que je ne suis pas chef de chœur ou d’autre organisation, j’ai simplement pensé tout à l’heure à la musique des sphères de Charles Fourier, à ses harmonies incomparables (ce sont certes des utopies mais elles vivent en tant que telles), et c’est plaisant d’imaginer l’inimaginable, non ?
– après tout, tu me le rappelles, c’est un peu comme le pari de Pascal concernant l’existence de Dieu : qu’aurions-nous à perdre si sa révélation réverbérante se produisait un jour… ou même une nuit ?
Je remercie vivement Jacques de m'accueillir sur sa page, et suis heureuse de vous proposer ici la promenade d'Elise :
Il était cinq heures du soir, tu repoussais le portail derrière toi, il grinçait un peu, sur ta gauche la chapelle, face à toi la maison d’Huguette, parfois son visage derrière les rideaux tirés, elle te guettait, sortait, te proposait un café au lait ou des bonbons, tirer les vers du nez elle savait, couper court à ses questions, dire non, marcher sur la petite route, serait-elle là, un coup d’œil de l’autre côté à la grande maison à volets verts, des vaillants, un jardin, des fruitiers, les marchés à Bayonne le samedi matin très tôt, et puis des vieux, des retraites, ils étaient à l’aise, on disait, et on les enviait, Huguette et eux comme chien et chat, des histoires de conseil municipal, des rivalités, des jalousies plus vieilles qu’eux, on en riait un peu, et puis plus de maisons pendant un moment, une plaine, ces prairies, de l’or, on disait, où serait-elle ? une inquiétude, tu ralentissais presque, sur la butte une maison vide, elle montre on disait, on ajoutait quand même ils pourraient réparer le toiture, tu avançais, ta maison aurait les volets clos, un de la lumière vers l’ombre tu te disais, la route se rapprochait de la forêt, de la rivière, jeu des lumières et des saisons, tu ne s eur, messes basses, un de ces malheurs qui font honte, un jour elle l’avait trouvé pendu, ses fils près d’elle, puis la maison de Silveri, il était souvent dehors, le corps presque plié à angle droit, un mot gentil que tu comprenais à demi, sa femme le rudoyait, « elle irait chercher la lune pour ses enfants » il buvait, le petit pont, comme un goulot dans la forêt, les jonquilles poisseuses de sève pour maîtresse, c’était là, marcher encore, à nouveau la plaine, des champs, des prairies, une maison, Thérèse, la grand-mère souvent là sur ton passage « agur matela gorria bonjour joues rouges », les jeunes au travail, elle était seule, des cerisiers, le grand virage, tu y étais presque, descendre le petit chemin, encore des cerisiers, la haie tout du long, des nids, un oiseau s’envolait, tu poussais la porte, ton cœur bondissait, un bon jour, l’odeur du chocolat mijoté sur le fourneau, dans un instant fendre sa peau épaisse « tela », elle était là
J'accueille avec plaisir Jacques - le promeneur, et me déplace chez Jean-Pierre Boureux que je remercie !
Bonne lecture.
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La Ronde (Vanitas)
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Vous mourrez avant votre disque dur.
Mourir est un détail agaçant, un vice de forme, la preuve de l'obsolescence programmée, une divine surprise.
Vous avez fait de grandes choses ? allons ! mais vous mourrez avec tous vos atomes intacts, comme neufs - un vrai gâchis - : fer et calcium à revendre, carbone en quantité, et passons sur les oligo-éléments, l’azote et le phosphore dont le plus gros partira en fumées que les pluies d’automne rendront à la terre sous forme d’hydrates : vous qui saviez vous défendre de toute ingérence, voici que vous finirez par être récupéré malgré vous.
Le reste, environ quatre cent grammes de craie grise sera un précieux amendement pour les terres sableuses ou trop argileuses, on attendra le printemps suivant pour vous absoudre, vous dissoudre, vous épandre au bord des talus. Un peu plus tard vous ferez une remontée majestueuse : ajoncs bavant le jaune au dessus des routes, bouleaux ou aulnes (plantes pionnières) et bientôt vous grimperez aux branches d’un chêne pédonculé ou d’Amérique, ou bien à celles d’un noyer commun (Juglans regia L.).
C’est ainsi qu’ont passé tous ces gens dont vous vous souvenez : saltimbanques avec des masques, véritables personnages d’Ensor qui vous croisaient par les rues, la bouche cousue dans un rictus de mépris.
Voici donc comment notre généalogie a marqué son empreinte sur le monde, et déterminé le paysage, l’homme : à peine plus qu’une mésange (et ce qui reste sur le disque ne durera pas plus).
Marchez pieusement dans les forêts : le vent bleu et gris y siffle à travers les bras de vos ancêtres.
Quelqu’un de bien a dit « ce n’est pas le temps qui nous change, ce sont les gens et les événements qui nous rentrent dedans. »…
Parfois on se rentre vraiment dedans.
Après, tout dépend de l’impact,
Et du temps.